SION-Cities. Histoires des juifs, portraits urbains : Au-delà de l’attribut géographique dans l’Europe prérévolutionnaire

Mercredi 25 octobre 2023 de 9h-17h
Colloque

dans le cadre du projet Sion-Digit, ce colloque réunira des chercheurs de disciplines diverses et des projets de recherche d’une part et, d’autre part, des représentants des établissements publics, musées et archives, de trois pays (la France, l’Italie et les Pays-Bas), pour approfondir les interrogations, échanger des savoirs et sciences et renforcer liens et efforts pour faire avancer nos connaissances de la vie des juifs dans les cités, dans la période 1500-1700. Ce sera aussi l’occasion de partager l’état de l’art, les nouvelles découvertes et les nouvelles perspectives avec le grand public.

Nous sommes loin d’avoir reconstitué la présence des juifs dans la vie et la physionomie urbaines à la base d’indices et récits tirés de sources primaires fiables, même pour les villes portant un ghetto en leur sein. L’historiographie a-t-elle épuisé toutes les sources susceptibles de nous raconter la vie des juifs dans les cités européennes prémodernes ?

Entre 1500-1700, les lieux d’accueil des juifs n’ont souvent pas manqué de créer pour la postérité une image de ces derniers qui suivait avant tout les attributs de classification convenables à l’administration et à l’archivage. Ces catégories font référence aux derniers lieux de provenance (parfois présupposés) des individus juifs. Ces étiquettes géographiques, intégrées par les administrations des communautés elles-mêmes, signifiaient simultanément des dénominations religieuses mais dissimulaient des réalités beaucoup plus confuses et nuancées. Les administrations des villes qui ont connu la présence d’une minorité juive ont ainsi (consciemment ou inconsciemment) estompé de manière conséquente les couleurs diverses, vives et changeantes de leur paysage humain. Ainsi, un juif qui avait délaissé l’Espagne des décennies auparavant, arrivait à Venise, parfois passant successivement par le Portugal et l’empire byzantin ou ottoman et, après avoir trouvé refuge dans des villes telles que Constantinople, restait attaché à la langue, les rites et la culture ibériques. Cependant, l’administration vénitienne le reçut parmi les Levantins, avec leur propre synagogue, ou natio, levantine. Cela n’empêchait pas la personne de fréquenter la synagogue espagnole ou la synagogue allemande et de définir son identité culturelle soit cultuelle d’autres manières que par la référence topographique. Et pourtant, ces catégorisations ont influé sur la perception, dans l’historiographie et au sein du grand public, des vies des juifs de l’époque prérévolutionnaire et plus particulièrement de leurs pratiques culturelles et religieuses.

«Portugais», «Levantins», «Allemands» : qu’est-ce que cachent ces appellations normatives, renvoyant toujours à un «avant», sur les vies urbaines des juifs européens, entre expulsions ibériques et Révolution française ? Pour répondre à cette question, nous proposons de mettre au centre de notre enquête des sources où la voix des habitants juifs est perceptible, par résonance ou par prise de parole directe, nous permettant de reconstituer le portrait de leurs vies et de leurs habitats. De nouveaux projets de recherche peuvent-ils nous porter au-delà de ces vieilles circonscriptions géographiques et au-delà de l’idée des liens d’attachements fluides des juifs, comme cela a été observé notamment pour les «portugais» (Bodian, Wilke, Nahon, Salomon, Révah, …) avec un sens d’appartenance à la réalité abstraite de la Naçao dans le hic et nunc des diverses villes prérévolutionnaires ? Parmi les grands sujets à aborder figureront ainsi :

  • Quel est le poids épistémique du renvoi géographique ?
  • En quoi les nouvelles technologies au service de l’historien modifient les alternatives de micro-histoire, histoire spatiale ou histoire locale versus histoire globale, «global history», et «connected histories» (cf. les synthèses de Ghobrial ; De Vito, 2019 ; Subrahmanyam 1997). Ou bien : comment nous aident-elles ou nous gênent-elles à combiner micro-histoires et histoire d’un peuple en diaspora pour la reconstitution de la vie quotidienne des juifs dans les villes de l’Europe de la première modernité ? Comment se réaffirme l’importance des vieilles disciplines philologiques et littéraires ?
  • Quels paramètres et coordonnées pouvons-nous définir pour décrire les «cityscapes» des juifs de l’époque prérévolutionnaire ?
  • Est-il possible de décrire le paysage d’une ville sans exclure les liens transfrontaliers au sein de cette ville ?

Entre les sources inexplorées et des retombées ambitionnées, les collections d’archives et les reconstitutions muséales destinées à un partage avec le grand public, le monde de la recherche occupe une position clé, mais à pied égal avec les dépôts d’archives et les musées.

En savoir plus

 

Programme à venir

Lieu

Musée d’Art et d’Histoire du judaïsme
Hôtel de Saint-Aignan
71, rue du Temple
75003 Paris

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